Prêt immobilier : en francs suisses ou en euros, quelles options pour les frontaliers ?

Avec des revenus perçus en francs suisses (CHF), les frontaliers ont la possibilité en cas de projet immobilier, de contracter un prêt en devise suisse (CHF) ou en euros (EUR). Clément Hostein, Responsable Espace Habitat au Crédit Agricole des Savoie revient sur les avantages et inconvénients de ces deux solutions, afin d’investir dans la pierre le plus sereinement possible.

Clément Hostein, responsable espace habitat Crédit agricole

En tant que frontalier, qu’est-ce qui change lorsqu’on souscrit un prêt immobilier ?

La particularité, c’est qu’un frontalier a des revenus dans une devise différente de celle avec laquelle il va acheter son bien. Il a alors trois options :

  • Souscrire un prêt directement en CHF qu’il rembourse avec ses revenus,
  • Souscrire un prêt en EUR qui va nécessiter de changer des CHF,
  • Ou bien un mélange des deux, 50 % en CHF et 50 % en EUR par exemple.

Le prêt en devise peut être contracté des deux côtés de la frontière, mais la plupart du temps, il est réalisé côté France, car il est plus difficile de faire accepter ses garanties auprès des banques suisses.

Pour bénéficier d’un prêt en CHF, vous devez impérativement justifier de revenus en CHF.

Sous réserve d’acceptation de votre dossier de prêt par votre Caisse Régionale de Crédit Agricole, prêteur. Vous disposez d’un délai de réflexion de 10 jours pour accepter l’offre de prêt. La réalisation de la vente est subordonnée à l’obtention du prêt. Si celui-ci n’est pas obtenu, le vendeur doit vous rembourser les sommes versées.

 

En quoi le prêt en francs suisses est-il spécifique et différent d’un prêt en euros ?

Il n’y a pas de grande différence en soi. On pratique en France les mêmes normes fixées par le Haut Conseil de Stabilité Financière, avec un taux d’effort qui ne doit pas dépasser 35 % par exemple. La seule grande différence, c’est par rapport au risque de change qui n’est pas pris au même moment : il est pris à chaque échéance pour un prêt en EUR et à la revente en cas de prêt en CHF.

 

Et par rapport à ce risque de change, quel prêt serait le plus intéressant ?

Tout d’abord, le risque de change est un avantage ou un inconvénient, en fonction de l’évolution du cours. Mais surtout, il s’applique de façon différente en fonction de chaque type de prêts.

 

Dans le cas d’un prêt en francs suisses :

Le remboursement s’effectue en CHF, donc il n’y a pas de risque pour les mensualités, qui sont connues. En revanche, il y a un risque si le bien est revendu avant la fin du prêt. Si par exemple vous revendez au même prix, vous pourrez avoir une plus-value ou une moins-value en fonction de l’écart entre le cours fixé au moment du déblocage du prêt et le cours au moment de la revente. En cas de moins-value, il faudra donc rajouter une somme pour couvrir la perte. Pour un prêt immobilier où les sommes empruntées peuvent être importantes, c’est donc à prendre en compte avant de faire son choix, notamment pour les primo accédants qui revendent leur bien en moyenne 7 ans après leur 1er achat.

 

Dans le cas d’un prêt en euros :

Il va falloir rapatrier tous les mois la somme en CHF nécessaire pour couvrir le remboursement. Si le cours est à 0,95 (1 € = 0.95 CHF) et que vous devez rembourser 1 000 €, la mensualité vous coûtera 950 CHF. En revanche, s’il monte à 1,05, vous devrez rembourser 1 050 €. A l’inverse, s’il baisse à 0,90, vous serez gagnant. Dans ce cas, le risque de change est donc réparti sur toute la période de remboursement.

Le risque de change existe et on ne peut pas le maîtriser totalement, quelle que soit la solution choisie. Ce qui est important, pour limiter les risques, c’est de faire des choix éclairés en fonction de son projet.

Le + du Crédit Agricole

Grâce à nos offres de prêt en devise CHF, vous pouvez :

  • Bénéficier d’une garantie qui couvre le risque de change entre le moment de la signature de l’offre de prêt et la date du premier déblocage des fonds en EUR (sous conditions)
  • Automatiser le rapatriement d’une partie de votre salaire en CHF avec le prélèvement transfrontalier sur Suisse.

Pour répondre à vos besoins en tant que frontalier, n’hésitez pas à vous rapprocher de nous ! Le Crédit Agricole se tient à votre disposition dans votre région.

En quoi le projet influe-t-il sur le type de prêt ?

Le premier critère, c’est le type d’acquisition. Par exemple, si c’est une première acquisition et que vous savez que vous allez potentiellement revendre dans 2 ou 3 ans, cela peut inciter à un crédit en EUR, malgré le risque de change tous les mois pour rembourser sa mensualité.

A l’inverse, pour une personne plus âgée, disons 45 ans, qui achète une maison avec un apport, qui a un projet de carrière professionnelle en Suisse et qui a prévu de rester dans son bien longtemps, un prêt 100 % CHF peut être une option plus judicieuse. Le fait de payer la même mensualité en CHF tous les mois est aussi une source de stress en moins pour certaines personnes.

Enfin, pour quelqu’un qui hésite, nous allons lui proposer de mélanger les deux, à 50 % / 50 %, ou selon une autre répartition en fonction de son profil. Cela permet de partager le risque. S’il revend plus tôt avec une moins-value par exemple, il sera en partie perdant sur le crédit en CHF mais il en aura potentiellement profité tous les mois sur la partie en EUR.

Il n’y a pas de solution parfaite et idéale, car on ne maîtrise ni l’évolution du cours, ni l’évolution du projet de vie. C’est pour cela qu’il faut en parler avec son conseiller en toute franchise et en toute transparence. Il est primordial de se faire accompagner par des conseillers experts qui vous poseront les bonnes questions et étudieront certains critères pour bâtir avec vous le plan de financement le plus adapté à votre situation et à vos besoins.

clé sur porte d'un logement

Et si on achète pour faire un investissement locatif ?

Si vous achetez pour louer en France, vous allez percevoir des loyers en EUR qui serviront à financer votre bien. C’est un peu un non-sens que de contracter un prêt dans une autre monnaie. Il vaut donc mieux rembourser en EUR et ne pas prendre de risque de change inutilement.

Quelles conditions spécifiques au statut de frontalier sont importantes, afin de contracter un prêt en CHF ?

En termes d’éligibilité, les banques vont être plus frileuses si la majorité des revenus ne sont pas en CHF. Mais c’est généralement le cas des frontaliers, même en couple. Le conjoint qui travaille en Suisse a souvent un salaire plus important, et de fait, plus de 50 % des revenus du couple sont en CHF.

une pièce de franc suisse et une courbe d'évolution
couple prêt immobilier

Donc le fait qu’un conjoint ne soit pas frontalier n’est pas un problème ?

Cela peut rentrer dans une stratégie de répartition sur qui va payer quoi entre les deux conjoints. Par exemple, pour un couple de travailleurs frontaliers et français, nous allons proposer une répartition entre le prêt EUR et CHF identique ou approchant la répartition entre la part de salaires EUR et CHF du couple. Cela permet à chaque conjoint de rembourser dans la devise qu’il gagne et d’être plus serein.

Que se passe-t-il si l’on perd le statut de frontalier ?

Si vous ne percevez plus de devise CHF, pour quelques raisons que ce soit, il faut rapidement consulter la banque auprès de laquelle vous avez contracté votre crédit immobilier pour voir ce qu’il est le plus pertinent de faire :

  • S’il faut racheter le prêt EUR, nous allons repartir sur des conditions actuelles, qui peuvent être moins favorables que celles à la signature du prêt. Ce sont des opérations importantes. Donc quand on s’engage sur un rachat, il vaut mieux être sûr que l’on ne va pas retravailler à nouveau en Suisse. A l’inverse, vous n’avez pas pour idée de retrouver un travail en Suisse, la question doit se poser. Les salaires suisses sont plus élevés à poste équivalent en France et permettent donc de plus hauts niveaux de remboursement.
  • S’il faut racheter le prêt CHF et que vous êtres sûr de partir de Suisse, il est également possible de débloquer le deuxième pilier. Il faudra alors penser à remettre en place une épargne retraite pour compenser la perte de ce pilier et donc la baisse de la retraite complémentaire.
  • La revente du bien peut également être la solution.

Encore une fois, le plus important dans ce cas-là, c’est de prendre contact avec son banquier pour étudier toutes les options possibles.

 

Le deuxième pilier suisse peut-il aider dans le cas d’un financement immobilier ?

Oui, il peut effectivement être retiré avant la retraite, mais sous conditions, pour servir d’apport pour acheter sa résidence principale ou rembourser une hypothèque. C’est d’autant plus important en période de taux hauts, avec des crédits moins faciles à obtenir. Il faut pouvoir compter sur un apport de 10 % en moyenne, et le deuxième pilier peut intervenir pour cela.

Attention en revanche, car l’utilisation des fonds est soumise à conditions, et varie selon les caisses de retraite. Vous ne pourrez vous en servir que pour financer le montant de l’achat de la résidence principale, et non pas pour financer les frais de notaires. Il faut donc quoi qu’il arrive avoir de l’épargne de côté si l’on veut acheter. Et en cas de revente du logement en question, les sommes retirées du 2ème pilier devront être remboursées.

Autres points importants à prendre en compte :

  • la fiscalité : si vous injectez la somme du deuxième pilier en France et que vous êtes affilié à la CMU, celle-ci va venir gonfler votre revenu fiscal de référence. Et comme il sert de base de calcul aux cotisations de l’année suivante, celles-ci vont donc augmenter.
  • la retraite : cela entraînera également une baisse de la retraite complémentaire car rappelons-le, l’objectif du 2ème pilier est avant tout de capitaliser pour la retraite.

Bref, tout comme il est essentiel de parler avec son banquier en France, il faut également prendre contact avec la caisse de pension gestionnaire de votre 2ème pilier, qui pourra vous dire précisément les conditions dans lesquelles vous pouvez retirer les fonds.

PTZ prêt à taux zéro

Peut-on articuler un prêt en CHF avec des dispositifs français du type prêt à taux zéro (PTZ) ou éco-PTZ ?

Oui, il n’y a pas de complexité particulière. Ces prêts réglementés sont de toute façon forcément en EUR.

L’éco-PTZ, qui sert pour les travaux de performance énergétique, est intéressant notamment car il n’est pas sous condition de ressources. Il faut toutefois noter qu’on ne peut souscrire qu’à un seul éco-PTZ. En cas de rénovation, nous conseillons d’avoir une approche globale, et de ne pas changer uniquement les fenêtres, mais de réfléchir au chauffage, à l’isolation extérieure, etc. Cela permet de financer une rénovation globale plus performante que si l’on n’avait fait qu’un seul bouquet de travaux.

 

Le + du Crédit Agricole

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  • Estimez la performance énergétique actuelle de votre logement pour obtenir des recommandations adaptées à vos besoins (confort, économies, réglementation..) sur les travaux, les aides et des estimations de financement.

 

Retrouvez l’intervention de Clément Hostein le 30 octobre 2023, lors du salon des frontaliers organisé par le Groupement Transfrontalier Européen.

Le Crédit Agricole et les frontaliers

Pour vous aider dans vos démarches ou pour toute question relative à nos offres et services à destination des frontaliers, prenez contact avec le conseiller le plus proche de chez vous.